Bien, bien, bien... Si c'est comme ça, je ressors un autre vieux texte. Na.

Le ciel était immense et les étoiles nombreuses. La chauve-souris me dit « suis-moi ! », alors je la suivis. Les maisons étaient petites, en bas, toutes petites. Plus petites que des graviers, mais pas autant que des fourmis. Enfin, ça dépend à quelle distance on se place. Plus petites quand même que des fourmis trop agrandies, et plus grosses que des graviers vus de très loin. Bref, des petites maisons vues de très haut, avec des lumières qui brillaient comme si les constellations se reflétaient sur la terre. Je grimpai, je grimpai, tant et si bien que la chauve-souris m'abandonna, car il faisait froid et cette idiote avait laissé tomber son pull en essayant de le mettre en plein vol. Je montais, donc, et il ne fallut pas longtemps avant qu'un gigantesque dragon céleste, porté et mu par quarante-deux Chinois exécutant une danse complexe, m'ouvre le chemin vers les portes de l'espace. Malheureusement, le dragon, ne pouvant pénétrer dans l'espace aérien lunaire pour des raisons politiques, dut me laisser à mon ascension, non sans m'avoir craché quelques flammes d'adieu, auxquelles je répondis, comme le veut le protocole, en effleurant mon béret avec un soupçon de véhémence. Passée la lune, je regardai par-dessus mon épaule et m'étonnai de ce que la Terre fût si petite, quoique plus grosse qu'une fourmi, voire qu'un gravier, si on les observe à la bonne distance. Sans m'attarder, je flânai longuement avant de mettre le cap sur Aldebaran, l'étoile au nom le plus cool que je connaisse (d'où mon choix). Sur le chemin, une casserole m'accompagna, gambadant lourdement sur ses quatre pattes velues et griffues. Un T fort serviable m'indiqua qu'il s'agissait d'une grande ourse, laquelle me souffla à l'oreille que le gentil T était un cygne. « Un cygne cabalistique, alors ! » dis-je, ce à quoi l'ourse acquiesça, pince-sans-rire. Hélas, lors même que nous dissertions de la couleur des trous noirs, nous croisâmes un chasseur. Mille plombs surchauffés pulvérisèrent le cœur de l'ourse, projetant sur mon visage un masque de mille gouttes écarlates. La pauvre bête s'affaissa sur l'espace interstellaire avec fracas, tandis que des larmes abondantes striaient mon masque de sang de griffures verticales. L'une d'elles, happée par le vent solaire, alla s'enrouler autour de la Terre. Les loups des steppes hurlèrent leurs plus beaux cris à la vue de cette étoile filante. Ah, chasseur, piètre homme, moins que rien, qu'as-tu fait ? Ôter au ciel pareille constellation, et m'ôter une amie. Heureusement, je n'eus qu'à lui faire remarquer que le vide régnait autour de lui pour que son organisme surpris s'en accommodât, sa pression interne en distordant les tissus et l'air sifflant hors de ses poumons, arrachant sang et cris à une gorge mourante. Malencontreusement, mon pied percuta le grotesque pantin qui voltigea vers le soleil. Le sang séché de l'ourse serait désormais et pour toujours mon masque. Je repris mon vol vers Aldebaran, fredonnant quelques chansons enfantines pour meubler le silence absolu des espaces infinis, de sorte que celui-ci ne m'effrayât point — comme quoi, ça tient à peu de chose. Je croisai le scorpion qui, de son dard acéré, me gratta fort aimablement le dos. Comme il se faisait tard, j'enjambai le tourniquet et pris le premier astéroïde en partance, de manière à arriver avant la tombée de la nuit. Une armée de sagittaires s'agitèrent, mais déjà ils étaient loin et l'astéroïde me portait à grande vitesse vers ma destination, me berçant du doux bruit de ses turbopropulseurs. Je saluai un petit groupe d'aventuriers qui chevauchaient à dos de comète, et m'endormis, rêvant d'un feu d'artifice de supernovæ se reflétant dans les glaces d'Io où phoques, ours, pingouins, loups, enfants esquimaux et renards des neiges dansaient une ronde endiablée.