À l'occasion d'une formation, j'ai fait la connaissance d'un collègue, Afshin, qui doit avoir à peu près mon âge. Il a fui l'Iran avec ses parents vers l'âge de douze ans pour s'installer en Allemagne. Aujourd'hui, quand il parle du village de son enfance, c'est du village allemand où il a fini de grandir. Quand il parle de son pays, c'est de l'Allemagne. L'Iran, il connaît bien, ce sont ses cousins mais ce n'est plus chez lui.

Un soir, autour d'une bière, Afshin se livre un peu et parle de ses jeunes années en Iran. Il se rappelle l'électricité coupée, signe qu'il faut descendre dans les caves ; le sifflement de l'obus ; la vibration sourde et le soulagement de ne pas avoir été la cible.

Il y a aussi la fois où il a failli être embarqué par la milice, fusil d'assaut sous le nez, parce qu'il portait un t-shirt au dessin trop américain.

Voilà ses souvenirs d'enfance.

Aujourd'hui, Afshin a un garçon de cinq mois et il conçoit les logiciels qui accompagnent les appareils d'imagerie médicale.

Je me demande bien le regard qu'il a sur ces images de familles noyées qui voulaient offrir à leurs enfants une vie comme la sienne.